Contrairement au contrat à durée indéterminée qui peut être résilié à tout moment moyennant un délai de préavis, le contrat à durée déterminée ne prend, en principe, fin qu’à son échéance. Sa rupture anticipée reste toutefois possible, sous certaines conditions.
HÉMÉRA Avocats – Me Isabelle MOREAU
LA CLAUSE RESOLUTOIRE
1er réflexe : il faut vérifier les dispositions de son contrat.
En effet, il peut contenir une clause stipulant que si l’une des parties ne respecte pas ses engagements, le contrat sera résilié de plein droit. C’est ce qu’on appelle la clause résolutoire.
Rédaction : La clause doit lister les manquements visés. Elle peut préciser si le manquement doit être total ou si un manquement partiel suffit.
Elle est interprétée de manière restrictive : elle ne pourra être mise en œuvre que pour les obligations dont elle sanctionne le manquement.
Mécanisme : Elle prévoit souvent qu’une mise en demeure d’exécuter ses obligations doit être envoyée au préalable. Si c’est le cas, la mise en demeure doit obligatoirement mentionner qu’en cas d’inexécution, le contrat sera résolu de plein droit.
Ensuite, le créancier reste libre de mettre en œuvre ou non la clause résolutoire. Il peut y renoncer même si elle est acquise.
Moyens de défense : Le débiteur de l’obligation peut contester l’acquisition de la clause résolutoire devant le juge qui vérifiera que ses conditions sont réunies.
Les pouvoirs du juge sont limités : il ne peut que constater si l’infraction reprochée est établie ou non, sans pouvoir apprécier sa gravité. Il peut toutefois accorder un délai de grâce au débiteur (Article 1228 du Code civil), ou écarter l’acquisition de la clause résolutoire si le créancier l’a mise en œuvre de mauvaise foi.
→ Avantage : La résolution du contrat est automatique si le manquement persiste à l’issue du délai prévu, l’action judiciaire n’est pas nécessaire.
→ Inconvénient : Le créancier de l’obligation peut avoir à subir des délais supplémentaires en cas de contestation devant le juge.
LA RESOLUTION UNILATERALE
Mécanisme : Il s’agit de notifier à l’autre la résolution du contrat à la condition de justifier d’une inexécution grave. Elle peut être liée au comportement du débiteur de l’obligation (mauvaise foi, déloyauté), ou à l’obligation inexécutée qui doit être essentielle.
En pratique, il y a deux étapes :
- Sauf urgence, il faut d’abord envoyer une mise en demeure de s’exécuter dans un délai raisonnable. Cette mise en demeure doit mentionner qu’à défaut d’exécution, le contrat pourra être résolu.
- Si l’inexécution persiste à l’issue du délai imparti, il faut notifier la résolution du contrat en la motivant.
La résolution prend alors effet à la date de réception de la notification (Article 1229 du Code civil).
A noter: La résiliation unilatérale peut être mise en œuvre même en présence d’une clause résolutoire dans le contrat. (Cass. 3e civ., 08.06.2023, n°22-13.469)
Recours : Le débiteur de l’obligation peut la contester devant le juge qui exerce un contrôle a posteriori. Le créancier devra alors prouver la gravité de l’inexécution. Si elle n’est pas établie, il pourra condamner l’auteur à des dommages et intérêts voire à l’exécution du contrat (Article 1228 du Code civil).
→ Avantage : Cette procédure évite l’aléa et le coût d’une procédure en résiliation judiciaire. Le formalisme peut être plus souple que celui prévu par une clause résolutoire.
→ Inconvénient : La résolution est faite aux risques et périls de son auteur dont la responsabilité peut être engagée devant le juge qui peut effectuer un contrôle a posteriori si l’autre la conteste.
LA RESOLUTION JUDICIAIRE
Mécanisme : La résolution du contrat peut toujours être demandée en justice.
Condition : Il suffit de prouver que le débiteur n’exécute pas ses obligations. La mauvaise foi ne suffit pas (Cass. 1ère civ., 01.07.2020, n°18-26.352), il faut une violation d’une obligation contractuelle suffisamment grave.
La mise en demeure préalable n’est pas obligatoire (Cass. com., 16.02.2022, n°20-16.869), mais elle est utile pour prouver la gravité de l’inexécution et la mauvaise foi du débiteur qui s’abstient volontairement d’exécuter son obligation.
Si le juge estime que le manquement est suffisamment grave, la résolution du contrat sera prononcée aux torts du débiteur.
Moyen de défense : Le débiteur peut donc l’éviter en exécutant finalement le contrat, même en cours de procédure. Ce, à moins que le juge retienne que le retard à proposer l’exécution du contrat constitue une infraction grave justifiant la résolution du contrat.
Le juge peut également accorder au débiteur un délai pour se mettre en conformité. (Article 1228 du Code civil)
La résolution prend effet à la date fixée par le juge, généralement au jour du jugement. (Article 1229 du Code civil)
→ Avantage : Si elle est prononcée, la résolution est certaine, sans risque de recours judiciaire postérieur.
→ Inconvénient : C’est le juge qui apprécie si le manquement est suffisamment grave pour justifier une résolution du contrat.
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