DOMICILIATION BANCAIRE DES REVENUS

Domiciliation, DOMICILIATION BANCAIRE DES REVENUS, Hemera Avocats

Est-il légal de conditionner l’octroi d’un prêt immobilier à la domiciliation des revenus de l’emprunteur dans l’établissement de crédit ?

 

HÉMÉRA Avocats – Me Isabelle MOREAU

 

 

Souvent les banques intègrent à leurs contrats de prêt immobilier une clause de domiciliation de revenus.

 

Cette clause oblige l’emprunteur à verser ses revenus auprès de la banque qui lui a consenti le crédit.

 

L’ANCIEN ENCADREMENT DE LA CLAUSE DE DOMICILIATION BANCAIRE DES REVENUS

Ordonnance n°2017-1090 du 1er juin 2017 relative aux offres de prêt immobilier conditionnées à la domiciliation des salaires ou revenus assimilés de l’emprunteur sur un compte de paiement

 

Le recours à la clause de domiciliation avait été encadré en 2017.

 

La clause de domiciliation des revenus n’était valable qu’à deux conditions :

  • Avoir une durée de validité maximale de 10 ans ;
  • Comporter une contrepartie en faveur de l’emprunteur, telle une baisse des frais bancaires ou un taux d’intérêt préférentiel.

 

Si ces conditions n’étaient pas réunies, l’emprunteur pouvait verser ses revenus dans une autre banque, sans risquer de sanction.

 

Toutefois, ces dispositions ont été supprimées par la loi n°2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi PACTE), par crainte d’une non-conformité au droit européen.

 

 

AUJOURD’HUI, UNE EVENTUELLE CLAUSE ABUSIVE

CCA, Recommandation n°04-03 du 27 mai 2004, prêt immobilier

Article L 212-1 du Code de la consommation

 

A ce jour, le régime des clauses de domiciliation est régi par une recommandation de la Commission des clauses abusives de 2014 :

 

« 7- Considérant que :

– certaines clauses prévoient que l’emprunteur ouvrira obligatoirement un compte de dépôt à vue chez le prêteur et que ce dernier est autorisé de façon permanente à débiter le compte de l’emprunteur du montant des sommes exigibles ;

– d’autres clauses stipulent que l’emprunteur s’oblige à domicilier auprès du prêteur ses revenus, quelle que soit leur nature ou leur origine (salaire, pension etc…), pendant toute la durée du prêt ;

Que le non-respect de ces clauses est sanctionné par la déchéance du terme et qu’en outre cette déchéance est encourue alors même que l’emprunteur aura toujours satisfait à ses remboursements, que de telles clauses peuvent apparaître déséquilibrées au sens de l’article L132-1 du code de la consommation ; qu’enfin, les clauses selon lesquelles l’emprunteur est tenu, pendant toute la durée du prêt, de verser l’ensemble de ses revenus sur un même compte dans l’établissement du prêteur peuvent apparaître déséquilibrées si cette obligation n’est accompagnée d’aucune contrepartie individualisée au profit de l’emprunteur ; »

 

La clause de domiciliation bancaire des revenus pourrait donc, si elle ne comporte pas de contrepartie au profit de l’emprunteur, être considérée comme déséquilibrée et donc abusive.

 

Dans ce cas, elle serait réputée non écrite, ce qui signifie qu’il serait toujours possible de la faire reconnaître comme non valable, sans délai de prescription.

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN :

 

Par exemple, le juge a pu retenir que la clause de domiciliation des revenus pendant toute la durée du prêt qui était accompagnée d’un avantage individualisé par un réduction de 0,2% du taux du crédit applicable tant que l’emprunteur y domiciliait ses revenus et sans clause de déchéance du terme, ne crée pas de déséquilibre significatif désavantageant le consommateur. (Cour d’appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 09.01.2020, n° 18/01556)

 

Une autre juridiction a refusé de reconnaître le caractère abusif d’une clause de domiciliation aux motifs que la recommandation de la Commission des clauses abusives n’a pas de valeur normative et que ce type de clause ne figure pas parmi les clauses interdites (« clauses noires ») ni les clauses présumées abusives (« clauses grises ») des articles R 212-1 et R 212-2 du Code de la consommation. (Cour d’appel de Cayenne, chambre civile, 26.04.2021, n° 18/00624)

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