S’il souhaite que le bail d’habitation ne se reconduise pas automatiquement à son terme, le bailleur peut délivrer congé à son locataire, mais pour uniquement pour trois motifs.
HÉMÉRA Avocats – Me Isabelle MOREAU
Article 15 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989
LE CONGE REPRISE (POUR HABITER)
Le propriétaire peut d’abord souhaiter reprendre possession de son logement pour le mettre à la disposition d’un proche.
Auteur du congé : Le congé ne peut être délivré que par un bailleur personne physique.
Dérogation : La société civile familiale (parents et alliés jusqu’au 4e degré) peut faire délivrer à son locataire un congé reprise, mais uniquement au profit d’un associé. (Article 13 de la loi du 6 juillet 1989)
Bénéficiaire de la reprise : La loi fixe une liste limitative des bénéficiaires potentiels d’un congé reprise :
- Le bailleur
- Son conjoint, son partenaire de PACS ou son concubin notoire depuis au moins un an
- Ses ascendants et descendants, ainsi que ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire
Etant précisé qu’en cas de propriété démembrée, ce lien s’apprécie uniquement avec l’usufruitier, peu importe le lien entre le bénéficiaire et le nu-propriétaire. (Cass. 3e civ., 26.01.2022, n°20-20.223)
Mentions obligatoires : Le congé doit obligatoirement mentionner les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise, ainsi que son lien de parenté.
Cela est important car le bénéficiaire doit effectivement reprendre le logement et à titre de résidence principale, sauf motif légitime (problème de santé, libération tardive du logement par le locataire…).
Le congé doit également annexer une notice d’information sur les obligations du bailleur, les voies de recours et droit à indemnisation du locataire.
Sanction : Si le bailleur n’est pas en mesure de justifier du caractère réel et sérieux du motif de la reprise, le congé sera nul. Le locataire évincé aura droit à dommages et intérêts en réparation de son préjudice, voire à une réintégration dans les lieux.
En cas de congé frauduleux, une amende pénale (6.000 € maximum pour une personne physique et 30.000 € maximum pour une personne morale) peut également être prononcée.
LE CONGE POUR VENDRE
Il concerne le cas où le bailleur souhaite vendre son logement libre (et non occupé, ce qui générerait un abattement de la valeur du bien).
Le bailleur n’a pas à justifier d’un besoin de vendre, ni du prix de mise en vente.
En revanche, le locataire dispose d’un droit de préemption.
Exception : sauf si la vente intervient entre proches parents (jusqu’au 3e degré) et si l’acquéreur occupe le logement pendant au moins 2 ans à compter de l’expiration du délai de préavis.
A cet effet, le congé doit :
- Comporter l’identification précise des biens vendus qui doivent être strictement identiques à ceux loués (pas moins, pas plus) ;
- Mentionner le prix et les conditions de la vente (notamment les modalités de paiement du prix) ;
- Reproduire les mentions de l’article 15 II de la loi du 6 juillet 1989 ;
- Joindre une notice d’information sur les obligations du bailleur, les droits à indemnisation et recours du locataire.
Ce, sous peine de nullité si le locataire justifie d’un grief, c’est-à-dire que le manquement l’a empêché de faire valoir ses droits, auquel cas le locataire pourra bénéficier de dommages et intérêts, voire d’une réintégration dans les lieux, le bailleur pouvant, en outre, être condamné à une peine d’amende en cas de congé frauduleux.
Le locataire bénéficie d’un délai de réponse de 2 mois :
- Soit il accepte l’offre (aucune forme n’est imposée, mais l’acte d’huissier est conseillé): il dispose alors d’un délai de 2 mois ou 4 mois (s’il recourt à un emprunt) pour réaliser la vente. A défaut, l’offre de vente est nulle et le locataire perd son droit d’occupation.
- Soit il ne répond pas ou refuse la vente, auquel cas le bailleur est libre de vendre son bien à un tiers.
Attention, s’il vend finalement son bien à un prix ou des conditions plus avantageux pour l’acquéreur, le bailleur devra le notifier au locataire, lequel disposera de nouveau d’un droit de préemption qu’il peut exercer pendant un délai d’un mois.
A noter : il existe deux autres droits de préemption du locataire (Article 10 loi n°75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation) :
→ Dans le cadre de la vente par lots de plus de cinq logements dans le même immeuble,
→ Lors de la première vente après une subdivision et une mise en copropriété de l’immeuble.
LE CONGE POUR MOTIF LEGITIME ET SERIEUX
Enfin, le bailleur peut également, en fin de bail, délivrer un congé à son locataire pour un motif légitime et sérieux.
Ce motif peut être :
- Lié au comportement du locataire, notamment s’il n’exécute pas ses obligations ;
Par exemple : défaut répété de paiement des loyers, sous-location sans autorisation du bailleur, défaut de jouissance paisible des lieux (troubles de voisinage), exercice d’une activité professionnelle dans les lieux
- Personnel au bailleur;
Par exemple, s’il entend réaliser des gros travaux dans le logement qui nécessitent qu’il soit libre de toute occupation (ce, même s’ils ne sont pas indispensables dès lors qu’ils améliorent le bien), ou encore s’il a besoin de loger une auxiliaire de vie (lequel ne répond pas aux critères d’éligibilité du congé reprise pour habiter)
Le motif doit être précisément indiqué par le congé afin de permettre, s’il est contesté par le locataire, au juge d’en vérifier la réalité et la légitimité.
Le motif peut avoir cessé au jour de la délivrance du congé.
Sur le même thème:
– En VIDEO: visioconférence sur les motifs du congé donné par le bailleur
– Fin du bail d’habitation: le congé donné par le locataire
– Fin du bail d’habitation: formalisme du congé donné par le bailleur
– Fin du bail d’habitation: résiliation anticipée
– Bail d’habitation: expulsion