Spécificité française, le statut des baux commerciaux s’applique obligatoirement lorsque certaines conditions sont réunies.
HÉMÉRA Avocats – Me Isabelle MOREAU
Articles L 145-1 à L 145-3 du Code de commerce
DEFINITION ET INTERET DU BAIL COMMERCIAL
Le bail commercial est un contrat de location portant sur des locaux qui vont servir à exercer l’activité professionnelle du locataire, qu’elle soit commerciale, artisanale ou industrielle.
Il s’agit d’une particularité française importante car le bail commercial bénéficie d’un régime protecteur du locataire, notamment par son droit au renouvellement du bail et l’encadrement de son loyer.
C’est ce qu’on appelle la propriété commerciale.
Cela lui donne une valeur marchande, ce qui signifie que le locataire peut vendre son droit au bail à un autre commerçant :
→ Soit il le vend comme élément de son fonds de commerce (donc avec la clientèle, les installations, le matériel, etc.), ce qui implique que l’acquéreur exercera la même activité dans les lieux loués) : Dans ce cas, le propriétaire ne peut pas s’opposer à la cession.
Tout au plus le bail peut éventuellement imposer l’agrément préalable du bailleur, c’est-à-dire qu’il devra accepter que l’acquéreur devienne son nouveau locataire. Mais, en pratique, il pourra difficilement le refuser car s’il n’a pas de motif valable comme une insolvabilité connue, il pourrait être condamné pour abus de droit et la cession pourrait être autorisée en justice.
→ Soit il le vend seul, donc avec un changement d’activité : il faut alors vérifier ce que prévoit le bail car il peut comporter une clause de cession libre, une clause d’autorisation préalable par le bailleur ou encore une interdiction pure et simple de céder le seul droit au bail, ce qui est valable.
CONDITIONS POUR L’APPLICATION DU STATUT DES BAUX COMMERCIAUX
Les mentions sont importantes, mais ne suffisent pas. Par exemple, un contrat qui ne s’appellerait pas bail commercial mais en remplirait les conditions serait requalifié de bail commercial.
A noter: l’action en requalification se prescrit par 2 ans à compter de la signature du bail (Article L 145-60 du Code de commerce), sauf fraude (Cass. 3e civ., 23.09.2021, n°20-10.812)
Deux possibilités pour qu’il y ait un bail commercial :
Les conditions prévues par la loi sont remplies
Article L 145-1 du Code de commerce
1ère hypothèse: si les critères prévus par la loi sont remplis, le statut des baux commerciaux s’applique obligatoirement (on dit qu’il est d’ordre public), donc même si le contrat prévoit le contraire ou encore s’il ne prévoit rien parce que le bail est verbal.
Trois conditions doivent être réunies :
1/ Il faut un bail: donc la mise à disposition de locaux.
Le bail peut porter sur un terrain nu s’il y a un fonds commercial, industriel ou artisanal exploité dans des constructions fixes et solides édifiées avec l’accord du bailleur : un hangar avec fondations, une station de lavage, mais pas des constructions légères et modulables.
En contrepartie du paiement d’un loyer. Sans loyer, il n’y a pas de bail. (Article 1709 du Code civil)
2/ Il faut que le locataire soit immatriculé au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ; pas nécessairement dès la signature du bail, mais il doit l’être au moment de son renouvellement. En effet, cette immatriculation est exigée lors du congé de fin de bail pour que le locataire bénéficie du droit à son renouvellement ou bien d’une indemnité d’éviction si le propriétaire veut reprendre la disposition de ses locaux et refuse alors le renouvellement.
3/ Il faut que le locataire y exploite un fonds de commerce, c’est-à-dire qu’il dispose de sa propre clientèle. Le bail commercial concerne donc les locaux principaux, rarement les locaux accessoires comme une réserve à une adresse différente.
Point d’attention : certains baux ne peuvent pas être qualifiés de bail commercial :
- Le prêt à usage (sans loyer ou avec un loyer modique (Articles 1875 du Code civil))
- Le crédit-bail (le bien est loué par un crédit-bailleur avec faculté pour le locataire d’acquérir à l’expiration du contrat (Article L 313-7 et suivants du Code monétaire et financier))
- La convention d’occupation précaire (justifiée par des circonstances indépendantes de la volonté des parties)
- Le bail emphytéotique (d’une durée comprise entre 18 et 99 ans (Article L 451-1 du Code de commerce))
- Le bail à construction (le locataire s’engage à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver pendant la durée du bail (Article L 251-1 du Code de la construction et de l’habitation))
- La location-gérance (le propriétaire d’un fonds de commerce le loue à un gérant qui l’exploite à ses risques et périls (Article L 144-1 du Code de commerce))
- Le bail dérogatoire (les parties choisissent de déroger au statut des baux commerciaux en limitant la location à une durée maximale de 36 mois non renouvelable (Article L 145-5 du Code de commerce))
Les parties se soumettent volontairement au statut des baux commerciaux
2e hypothèse : le propriétaire et le locataire font le choix de se soumettre volontairement au statut des baux commerciaux, par mention dans le bail ou par leur intention si le contrat comporte les droits et obligations habituels du statut.
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